Publié dans Romans

Et ces êtres sans pénis ! – Chahdortt Djavann

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Titre : Et ces êtres sans pénis !

Auteure : Chahdortt Djavann

Date de parution : avril 2021

Editions : Grasset

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Chahdortt Djavann a eu le malheur de naitre sans pénis en Iran, comme des millions d’autres femmes, alors que ses parents espéraient ardemment un garçon.

Toutes ces femmes sont coupables. Coupables d’être nées sans pénis dans un pays où elles ne valent rien, n’ont aucun droit.

«Toute personne sans pénis, chauve ou pas, doit porter un bout de tissu sur la tête en public. Sept jours sur sept, à toute heure du jour ou de la nuit ; qu’il fasse chaud ou froid.
L’absence de pénis doit être désignée par un signe extérieur.
C’est la Loi.
Et le bout de tissu sur la tête symbolise l’absence de pénis.»

L’auteure tisse ici un texte singulier et n’hésite pas à s’affranchir des codes de la littérature en l’annonçant d’emblée au lecteur. À son histoire personnelle, ses confessions s’entremêlent des portraits de femmes qui témoignent de la dramatique condition féminine en Iran.

Des femmes bafouées, emprisonnées pendant des années pour une simple mèche de cheveux dépassant de leur voile ou encore attaquées à l’acide en pleine rue. Un mari peut, par exemple, tuer sa femme sans craindre la justice, après tout «il n’y a pas mort d’homme».

J’ai lu ce livre d’un seul souffle, sous le choc, révoltée. Les mots sont forts et ébranlent le lecteur, dépeignant le pire, l’impensable. Entre colère et tristesse, Chahdortt Djavann fait de sa plume son arme de dénonciation, une arme qui marque efficacement les esprits.

«Les mèches de cheveux qui dépassent du foulard ébranleraient à la fois les fondements du régime islamique et la vertu des hommes d’Allah en les incitant non au harcèlement sexuel, non à l’agression sexuelle, mais directement au viol. Sachez, mesdames, que courir, rire, chanter, danser, ne pas porter ou mal porter le voile… incite les hommes au viol.»

La romancière évoque avec sincérité ses souvenirs en Iran, son exil et sa relation à la France, son pays d’adoption dans lequel elle ne parvient pas à se sentir à sa place. Oscillant entre amour et haine pour son pays de naissance, elle raconte aussi ce sentiment de culpabilité qui lui pèse au quotidien, son impuissance alors que l’Iran souffre, que les victimes s’amoncèlent.

Et ce dernier chapitre chimérique qu’on aimerait tellement voir se réaliser. Un rêve qu’elle ose, une nécessité de croire que tout est possible.

«Certains féministes ajoutent un e au mot écrivain et aux autres métiers pour compenser ou pour souligner leur manque du pénis. Moi, je m’en fous éperdument d’un e de plus. Un e ne change rien à l’affaire. Un e ne remplace pas un pénis.»

Une lecture indispensable, puissante et percutante, dont les images vous hantent bien après avoir refermé le livre.

note coup de coeur

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